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Licenciement pour faute : quand démarre le délai de prescription de 2 mois en cas d’enquête interne ?

Pour sanctionner la faute d'un salarié, l’employeur doit agir dans les 2 mois suivant le moment où il a eu connaissance des faits fautifs. Lorsqu’il demande un rapport d’audit interne pour établir la réalité de ces faits, peut-il prétendre que ce délai de 2 mois débute à la date de remise du rapport d’audit ?

Agir dans les deux mois

Dès que l’employeur a connaissance d’un fait fautif, il doit engager la procédure disciplinaire dans un délai de 2 mois sauf si ce fait a donné lieu, dans le même temps, à des poursuites pénales (c. trav. art. L. 1332-4).

Pour les juges, le délai de prescription commence à courir à partir du moment où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié (CE 20 avril 2005, n° 254909 ; cass. soc. 7 novembre 2006, n° 04-47683, BC V n° 325).

En cas de contentieux, lorsque le salarié soutient que les faits sont prescrits, c’est à l’employeur de prouver qu’il en a eu connaissance dans les 2 mois précédant l’engagement des poursuites disciplinaires (cass. soc. 10 juin 2003, n° 01-41798 D).

Pour rappel, on considère que la procédure disciplinaire est engagée soit par la convocation à l’entretien préalable adressée au salarié (cass. soc. 5 février 1997, n° 94-44538, BC V n° 52), soit par la mise à pied conservatoire de celui-ci (cass. soc. 13 janvier 1993, n° 90-45046 D), soit par la notification de la sanction lorsque celle-ci ne nécessite pas d’entretien préalable (ex. : avertissement).

Décalage du départ du délai de prescription par la mise en œuvre d’une enquête interne

Il est parfois nécessaire de procéder à des vérifications avant de déclencher la procédure disciplinaire. L’employeur peut, par exemple, diligenter une enquête interne ou un audit.

Le délai de prescription court-il à la date du début de ces vérifications ou une fois celles-ci réalisées et leur conclusion portée à la connaissance de l’employeur ? Pour les juges, c’est une fois ces vérifications accomplies, que l’employeur peut être considéré comme connaissant pleinement les faits reprochés au salarié. Ce n’est donc qu’à ce moment-là que le délai de prescription commence à courir (cass. soc. 13 janvier 2009, n° 07-43282, BC V n° 3 ; cass. soc. 2 juin 2017, n° 15-29234 D).

Pour autant, l’enquête interne justifie le délai pris dans le déclenchement de la procédure disciplinaire seulement si elle était nécessaire (cass. soc. 17 septembre 2014, n° 13-17382 D).

Pas de décalage quand le rapport d’audit demandé n’est pas impartial

Un employeur reprochait notamment à une salariée, directrice administrative d’une association, d’avoir procédé à des virements à son profit sans autorisation à partir d'un compte de l’association ainsi que des absences et l'incohérence des congés payés mentionnés sur les fiches de paye. Ces faits étaient intervenus de janvier à août 2013 et la procédure de licenciement avait été engagée le 16 septembre 2013.

Après avoir interrogé le service comptable de l'association sur de possibles irrégularités de la directrice de l'association, l’employeur avait confié un audit à son expert-comptable le 21 août 2013.

Sa mission consistait à contrôler les opérations menées.

La cour d’appel a écarté ce rapport d'audit ne l’estimant pas impartial et elle a relevé que l'employeur n'établissait pas la date à laquelle il avait eu connaissance des faits reprochés.

Par conséquent, les faits justifiant le licenciement étant prescrits, la Cour de cassation confirme que le licenciement de la salariée se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse.

cass. soc. 10 juillet 2019, n° 18-11254 D

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